INTRODUCTION

Le contrat du travail, qui s’analyse en substance comme la convention par laquelle une personne s’engage à mettre son activité à la disposition d’une autre, sous la subordination de laquelle elle se place, moyennant une rémunération[1], peut prendre fin par le licenciement dont les causes et la procédure sont organisées par le législateur congolais.

De ce fait, parler de la procédure du licenciement revient à analyser les stades de la résiliation du contrat de travail à durée indéterminée par l’employeur.

En clair, pour licencier, l’employeur doit observer une procédure, qui varie suivant qu’il s’agit d’un licenciement pour motif personnel (inhérent à la personne du salarié) ou d’un licenciement pour motif économique[2].

De ce qui précède, il en serait que le code du travail n’a pas prévu des dispositions consacrant spécifiquement la procédure du licenciement, mais les contours de cette procédure peuvent découler une lecture croisée, critique et analytique des dispositions du code du travail.

Le droit du travail qui est généralement considéré comme cette discipline qui recouvre l’ensemble des règles juridiques régissant, dans le secteur privé, les relations du travail entre employeurs et salariés et régissant les rapports d’emploi (l’accès à l’emploi, le contrat de travail, les licenciement, etc.) les rapports professionnels, qui présentent une dimension collective (grève, négociation et conventions collectives, syndicales, représentation du personnel, etc.)[1], cette discipline a été conçue dans la logique de protection des salariés contre le mauvais usage du pouvoir des employeurs.

En effet, le constituant congolais en consacrant le droit du travail dans la catégorie des droits économiques, a voulu mettre en évidence la protection contre le chômage et une rémunération équitable et satisfaisante[2].

C’est pourquoi le code du travail a renchérit cette protection des salariés en prévoyant que « le contrat à durée indéterminée ne peut être résilié à l’initiative de l’employeur que pour un motif valable lié à l’aptitude ou à la conduite du travailleur sur les lieux de travail dans l’exercice de ses fonctions ou fondé sur les nécessités du fonctionnement de l’entreprise, de l’établissement ou du service »[3].

Il résulte de ce qui précède que le droit au travail pour tout salarié constitue le principe et le licenciement (qu’il soit personnel ou collectif pour motif économique) l’exception. Cette considération confirme la thèse selon laquelle le droit du travail a été conçu dans le but de la protection des salariés[4].

Au fait, le licenciement constitue normalement l’une des sanctions disciplinaires prévues par la loi (à savoir le blâme, la réprimande et la mise à pied), qui met fin aux rapports entre l’employeur et le travailleur et au contrat du travail.

Au demeurant, la lecture analytique du Code du travail congolais fait état d’une procédure spécifique attachée à chaque type de licenciement[5].

Le respect de la procédure y afférente est important dans la mesure où même licencié, le salarié bénéficie toujours de la protection légale de ses droits.

Cependant, dans la mise en œuvre de la procédure du licenciement, il se pose le problème de l’imprécision quant au commencement de la procédure du licenciement.

En d’autres termes, le législateur congolais semble n’avoir pas précisé le stade où l’on peut considérer que la procédure du licenciement a commencé. Ce qui suscite des interrogations dont la recherche des solutions sera au centre de nos investigations.

Ceci suscite les questions qui vont présider nos investigations dans le cadre de cette analyse. Ces investigations sont les suivantes :

  • Peut-on considérer que la procédure du licenciement débute, dans le cas de la commission de la faute lourde, par la notification que l’employeur a la faculté d’adresser au travailleur pour des raisons d’enquête ?
  • Quand est-ce la procédure du licenciement commence dans le cas où il est précédé du préavis ?
  • Concernant le licenciement massif, devons-nous considérer que le moment du déclenchement de la procédure est fixé par le législateur ou par le Ministre ayant le Travail et la Prévoyance Sociale dans ses attributions ?

Le licenciement, qui n’est que la résiliation du contrat du travail à durée indéterminée, c’est-à-dire que les parties  n’ont pas précisé directement ou indirectement la durée de leur engagement[6], a des préalables à observer dans le chef de l’employeur et une ligne de conduite à respecter du début des enquêtes jusqu’au licenciement définitif sous peine des sanctions légales à l’égard de l’employeur.

En effet, la résiliation sans motif valable du contrat à durée indéterminée donne droit, pour le travailleur, à une réintégration.

A défaut de celle-ci, le travailleur a droit à des dommages intérêts compensatoires fixés par le Tribunal du travail et calculés en tenant compte notamment de la nature des services engagés, de l’ancienneté du travailleur dans l’entreprise, de son âge et des droits acquis à quelque titre que ce soit[7].

            Concernant l’imprécision consacrées par le législateur quant au début de la procédure du licenciement, il s’avère que la procédure de manière générale, entendue comme l’ensemble des formalités qui doivent être suivies pour parvenir à une solution juridictionnelle de nature civile, pénale ou administrative selon le cas[8], ne commence qu’à partir du moment où l’entreprise entame soit l’enquête à l’égard d’un travailleur accusé d’avoir commis un méfait, ou encore elle commence lorsque l’entreprise pour n’importe quel motif, entame l’initiative de licencier un travailleur ou des travailleurs en cas de licenciement massif.

            Spécifiquement, pour le licenciement massif, il nous semble que la procédure du licenciement est coiffée par l’arrêté du Ministre ayant le travail et la prévoyance sociale dans ses attributions sous l’autorité toujours de la loi (Code du travail) qui lui confère cette attribution.

            Tout compte fait, nous estimons que dans la pratique, l’irrespect de la procédure du licenciement par les employeurs en République démocratique du Congo est dû au fait que le législateur congolais est imprécis sur tant des choses, notamment le commencement de ladite procédure, d’une part, et aussi par l’ignorance de cette procédure en particulier et de droit du travail en général par une bonne partie d’employeurs et des travailleurs.

D’où l’intérêt que présente cette analyse, qui sera une sorte de vulgarisation de cet aspect de droit du travail.

Cette analyse va s’articuler autour de deux chapitres, en dehors de ses parties introductive et conclusive :

  • Le premier ne sera qu’un regard analytique et explicative du licenciement en droit positif congolais et comparé (Droits français et allemand) ;
  • Le second analysera la procédure du licenciement en droit positif du travail congolais tout en relevant les insuffisances et en proposant des correctifs.

[1] S. GUINCHARD et T. DEBARD, Op.cit., p. 335.

[2] Article 36 de la Constitution de la RDC du 18 février 2006 telle que modifiée par la loi n° 11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la République démocratique du Congo, in JO RDC du 1er février 2011.

[3] Article 62 alinéas 1er de la Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail telle que modifiée et complétée par la loi n° 16/010 du 15 juillet 2016, in JO RDC, Numéro spécial, 57ème année, 29 juillet 2016.

[4] J-M. KUMBU ki NGIMBI, Droit social, droit du travail et de la sécurité sociale, Kinshasa, Galimage, 2015, p. 24.

[5] Pour ce qui est du licenciement personnel, le Code du travail prévoit une procédure qui fera l’objet de nos analyses tout au long de cette étude. Tandis que toute résiliation à l’initiative de l’employeur d’un contrat à durée indéterminée, fondée sur les nécessités du fonctionnement de l’entreprise, de l’établissement ou du service, est soumise aux conditions qui seront définies par un Arrêté du Ministre ayant le Travail et la Prévoyance Sociale dans ses attributions.

[6] MANGWAYA BUKUKU, « L’obligation de motif valable et de préavis dans la résiliation du contrat de travail », in Congo-Afrique, N°58, Kinshasa, p. 463.

[7] Article 63 alinéas 1er de la Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail telle que modifiée et complétée par la loi n° 16/010 du 15 juillet 2016, in JO RDC, Numéro spécial, 57ème année, 29 juillet 2016.

[8] S. GUINHARD et T. DEBARD, Op.cit., p. 683.


[1] G.H. CAMERLYNCK, Droit du travail : contrat de travail, Tome 2, Paris, Dalloz, 1982, p. 52.

[2] S. GUINCHARD et T. DEBARD, Lexique des termes juridiques, Paris, Dalloz, 2012, p. 522.

CHAPITRE 1 : ANALYSE DESCRIPTIVE ET EXPLICATIVE DU LICENCIEMENT EN DROIT POSITIF CONGOLAIS ET COMPARE

Le contrat de travail constitue, en régime libéral, la source principale des rapports individuels de travail. Ainsi libres de s’engager, les parties peuvent se désengager de leurs obligations. La liberté entraine donc la réciprocité.

Cependant, la théorie moderne du droit de travail a tendance à distinguer le principe de la liberté de celui de la réciprocité, de sorte que, si la conclusion du contrat de travail est encore soumise au principe de la liberté, celui de la réciprocité n’est plus de mise en cas de rupture du contrat[1].

Pour ce qui est du licenciement, qui est une rupture du contrat de travail par l’employeur, il exige l’observance de la procédure pour l’appliquer, et pour licencier, il faut une cause sérieuse et réelle pour que l’employeur ne puisse pas engager sa responsabilité délictuelle pour licenciement abusif ou sans motif valable.

En effet, la doctrine moderne invoque, à cet effet, les impératifs sociaux du droit du travail et la nécessité d’assurer la stabilité de l’emploi et des revenus des salariés ; et cela explique la distinction instaurée quant aux effets de la rupture du contrat de travail entre la démission du salarié qui ne constitue pas un grand danger pour l’employer et le licenciement du travailleur aux graves conséquences sociales[2].

Ainsi le législateur a réglementé strictement la cessation du contrat de travail dans ses deux formes par la définition des motifs susceptibles d’y donner lieu et par l’indication de la procédure à suivre par la partie qui prend l’initiative de la rupture.

C’est dans ce contexte que ce chapitre fera une analyse descriptive du licenciement en droit du travail (Section 1) avant de faire une mise au point sur l’analyse explicative du licenciement (Section 2).

Section 1 : Analyse descriptive du licenciement

Cette section traitera d’abord des notions du licenciement (§1), de typologie de licenciements ensuite (§2) et des motifs du licenciement enfin (§3).

§1. Notion du licenciement

Comme précédemment évoqué, le licenciement est une résiliation du contrat du travail à durée indéterminée, c’est-à-dire que les parties  n’ont pas précisé directement ou indirectement la durée de leur engagement[3].

Ce licenciement a des préalables à observer dans le chef de l’employeur et une ligne de conduite à respecter du début des enquêtes jusqu’au licenciement définitif sous peine des sanctions légales à l’égard de l’employeur ; car il est de principe qu’un contrat à durée indéterminée ne peut être résilié à l’initiative de l’employeur que pour un motif valable (soit lié à l’aptitude ou à la conduite du travailleur, soit fondé sur les nécessité du fonctionnement de l’entreprise)[4].

Pour bien saisir la portée de cette notion du licenciement, nous allons analyser son évolution dans le temps, ou son historique (A) et son importance (B).

  1. Historique

Parlant de l’historique du licenciement, nous notons que depuis les origines, le licenciement existait, mais n’était pas organisé par la loi comme c’est le cas aujourd’hui.

En effet, l’employeur qui était maître et disposant de tout pouvoir sur ses travailleurs, était libre de les renvoyer à sa convenance sans aucune forme de préalable ou de procédure ; d’où la raison même de la mise en place du droit de travail, conçu dans le but de la protection des salariés[5].

Pour ce qui est du licenciement pour motifs économiques, il n’est apparu en droit français qu’en 1969 dans un accord interprofessionnel, et ce n’est qu’après 20 ans, ou en 1989 qu’une loi l’a défini comme étant « le licenciement effectué par l’employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié »[6].

Le droit social français, départ cette origine du licenciement pour motifs économiques, repose ainsi sur l’idée que l’employeur peut décider unilatéralement de mettre fin à  un contrat de travail à condition de justifier sa décision, outre les fautes éventuelles du salarié concerné.

            En droit congolais par ailleurs, c’est depuis le 19 septembre 1974 que le licenciement massif est réglementé de manière particulière ou spécifique par l’Arrêté départemental 11/74 fixant les modalités d’application des articles 48 et 64 du code du travail (licenciements massifs, licenciements fondés sur les nécessités du
fonctionnement et licenciements fondés sur des raisons économiques
).

Du moins, nous pouvons retenir que la réglementation des modalités du licenciement peut être considérée comme l’une des raisons d’être du droit du travail, car il est hors de doute que dans tout Etat moderne, ce sont les pouvoirs publics qui tiennent à la stabilité de l’emploi, à la prospérité des unités de production et à imprimer au travail humain un caractère sacré[7] par une réglementation rigoureuse ; autrement dit, le licenciement c’est l’une des raisons d’être du droit du travail.

  • Importance

Parler de l’importance de licenciement revient à évoquer l’importance de l’éclaircissement des causes du licenciement, dans la mesure où elles permettent au travailleur licencié de connaître les motifs qui ont conduit à son licenciement ; et cela aussi manifeste l’intention du législateur qui est celle de bannir l’arbitraire dans l’exercice des pouvoirs reconnus à l’employeur, entre autres, la faculté qu’il dispose de résiliation unilatérale du contrat.

C’est pour cette raison qu’en droit allemand, l’employeur qui ne respecte pas ses obligations dans le cadre du contrôle du chômage (déclaration inexacte concernant le licenciement) peut être sanctionné par le paiement d’une amende pénale ou administrative[8].

§2. Typologie du licenciement

De manière générale, il n’existe que deux sortes de licenciement, à savoir le licencient individuel et celui collectif.

Cependant, chaque législation organise les modalités et conditions à suivre pour aboutir à ces deux types de licenciement.

De ce fait, il nous faut à ce stade analyser les types de licenciement selon l’organisation législative congolaise (A), avant de faire la même analyse en droit allemand (B).

  1. En droit congolais

En droit congolais, le législateur ne s’est pas limité à réglementer la conclusion et l’exécution du contrat de travail. Il a en outre prévu les modalités de cessation dudit contrat selon qu’il a été établi pour une durée déterminée ou pour une durée indéterminée.

En effet, pour le contrat à durée indéterminée, le législateur congolais organise d’une part, le licenciement individuel, qui est fondé sur l’aptitude ou la conduite du travailleur ; et dans ce cas, le ou les travailleurs licenciés doivent être remplacés immédiatement.

D’autre part, le législateur congolais prévoit un licenciement, qualifié de « massif ou pour des motifs économiques » fondé sur les nécessités du fonctionnement de l’entreprise uniquement après l’inspection du travail du ressort[9] et sous réserve de certaines conditions à observer.

  • En droit comparé (droit allemand)[10]

Contrairement au droit du travail congolais, celui d’Allemagne organise trois types de licenciement, à savoir : le licenciement ordinaire (1), le licenciement exceptionnel avec effet immédiat (2) et le licenciement de reclassement (3).

  1. Le licenciement ordinaire (Ordentlichekündigung)

C’est un licenciement qui est applicable en droit du travail allemand dans les cas suivants :

  • La société qui licencie n’a que dix employés ou moins et le travailleur licencié a une ancienneté de six mois ;
  • Lorsque le travailleur licencié a signé un contrat de travail avant le 1er janvier 2004 et que la société ne comptait qu’au moins cinq salariés ;

Dans ces cas, l’employeur ne peut rompre le contrat de travail (qu’il soit à durée déterminée ou indéterminée), outre la faute grave, que pour certains motifs[11] ; et devra dans ces cas consulter le Conseil d’entreprise (s’il existe un) et respecter un délai de préavis.

  • Le licenciement exceptionnel avec effet immédiat (auBerordentliche kündigung)

Ce licenciement est celui qui exclut le préavis. En effet, en droit du travail allemand, l’employeur peut mettre fin à un contrat de travail avec effet immédiat, c’est-à-dire sans préavis, mais exceptionnellement en raison d’un motif grave ou de faute grave dans le chef du travailleur[12].

  • Le licenciement de reclassement (Änderungskündigung)

En droit du travail allemand, l’employeur a la possibilité de proposer au travailleur, à la place du licenciement, un nouvel emploi ou une modification du contrat de travail, quitte au travail de se décider[13].

Apres cette comparaison de la législation congolais à celle allemande sur le licenciement, il nous faut évoquer les motifs du licitement.

§3. Motifs du licenciement

De manière général, le contrat du travail obéit aux conditions communes de rupture, outre les particularités de chaque législation, à savoir : la rupture par le consentent mutuel (c’est-à-dire par la volonté commune des parties, soit par transaction ou à l’amiable) ; la rupture pour cause de décès du travailleur (mais pas du chef d’entreprise) et la faute lourde.

Pour ce qui est des particularités, nous allons les relever selon qu’il s’agisse du droit du travail congolais (A) et du droit allemand (B).

  1. En droit congolais

Plusieurs raisons peuvent amener un employeur à prendre la décision de se séparer d’un ou plusieurs de ses salariés, mais une seule option s’impose à lui pour rompre un contrat de travail : le licenciement.

En effet, un salarié ne peut être licencié de façon arbitraire ou aléatoire. C’est la raison pour laquelle le droit du travail congolais veut que les causes et la procédure soient strictement respectées pour ce faire, faute de quoi, l’employeur sera astreint à payer des dommages et intérêts[14].

            Au sens de la convention sur le licenciement 1982 de l’Organisation internationale du travail, le licenciement est une cessation de la relation de travail sur l’initiative de l’employeur[15].

Autrement dit, le licenciement constitue la décision unilatérale par laquelle l’employeur met fin au contrat qui lie au travailleur[16].

En considération de son champ circonscrit à la rupture du contrat de travail du fait de l’employeur, le licenciement se dissocie ainsi des autres modes de cessation des relations de travail en droit congolais, telles que la démission, la force majeure, la rupture anticipée, etc.

D’autres situations en droit congolais ayant vocation à étendre le dynamisme protecteur du licenciement peuvent lui être assimilées.

C’est notamment le cas de la modification substantielle du contrat de travail ou de la mise à la retraite d’un travailleur âgé ne remplissant pas encore les conditions requises pour faire valoir ses droits à la retraite[17].

Quoi qu’il en soit, il existe deux types de licenciement, à savoir le licenciement pour motif personnel qualifié de licenciement individuelle (1) et le licenciement pour motif économique autrement appelé licenciement collectif (2).

Cependant pour être régulier, quant au fond, le licenciement en droit congolais doit être fondé sur une cause réelle et sérieuse. Les deux conditions doivent être remplies simultanément.

Une cause réelle est une cause ayant une réalité concrète et vérifiable. Elle doit aussi être objective et donc soit à la personne du salarié ou à son aptitude au travail, soit à l’organisation de l’entreprise.

Une cause sérieuse est une cause revêtant un certain degré de gravité rendant impossible sans dommage à l’entreprise la continuation du travail[18].

  1. Le licenciement individuel : motifs

Aux termes de l’article 62 de la loi du 25 octobre 2002 portant Code de travail, il est prévu que le contrat à durée indéterminée ne peut être résilié à l’initiative de l’employeur que pour un motif valable lié à l’aptitude ou à la conduite du travailleur sur les lieux de travail dans l’exercice de ses fonctions ou fondé sur les nécessités du fonctionnement de l’entreprise, de l’établissement ou du service.

Ceci suppose que les motifs et la procédure du licenciement varient selon qu’il s’agit d’un licenciement individuel dans le contrat à durée déterminée (a) que dans le contrat à durée indéterminée (b).

  1. Motifs du licenciement dans le contrat à durée déterminée

De prime à bord, il nous faut relever en ce qui concerne les motifs ici, à la lumière des article 69 et 70 de la loi du 25 octobre 2002 portant Code du travail, qu’il n’existe que deux modes de cessation du contrat de travail à durée déterminée, à savoir : la cessation à l’échéance convenue et la cessation avant l’échéance convenue. Et pour ce qui nous concerne, nous allons analyser la cessation avant l’échéance convenue.

En effet, le code du travail prévoit, à ses articles 70 et 72 la possibilité de mettre fin au contrat de travail avant le terme convenu, à la suite d’une faute, qu’elle qu’en soit l’ampleur.

La doctrine soutient également que le contrat de travail à durée déterminée peut prendre fin pour motif d’inexécution par une partie de ses obligations contractuelles[19].

En d’autres termes, le principe semble que toute rupture anticipée du contrat à durée déterminée est fautive, sauf lorsqu’elle est justifiée par la force majeure ou la faute lourde des contractants[20].

De ce fait, on peut distinguer le licenciement pour faute lourde, et sans faute lourde.

  • Le licenciement pour faute lourde

De manière générale, la faute lourde est différente de la faute grave, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié pendant la durée du préavis[21].

La faute lourde quant à elle traduit donc la volonté du salarié de nuire à l’employeur. C’est la raison pour laquelle la doctrine la qualifie de faute équipollente au dol, ou de faute intentionnelle[22].

            S’agissant du licenciement pour faute lourde dans ce cas précis, l’article 72 de la loi du 25 octobre 2002 portant Code du travail prévoit la possibilité de résilier immédiatement tout contrat (à durée déterminée ou indéterminée) en cas de commission d’une faute lourde[23].

  • Le licenciement intervenant sans faute lourde

Partant du contenu de l’article 72 alinéas 2 de la loi de 2002, qui considère qu’une partie est réputée avoir commis une faute lourde lorsque les règles de la bonne foi ne permettent pas d’exiger de l’autre qu’elle continue à exécuter le contrat, nous estimons aussi qu’une faute, même légère, qui a pour effet d’entamer la confiance de l’employé envers son employeur peut entrainer le licenciement.

Toute fois, si l’employeur procède par un licenciement irrégulier allant dans ce sens, les dommages et intérêts qu’il devra donner à son travailleur lésé par sa décision, correspondent aux salaires et aux avantages de toute nature dont le salarié aurait bénéficié pendant la période restant à courir jusqu’au terme de son contrat[24].

  • Motifs du licenciement dans le contrat à durée indéterminée

Le licenciement qui et une décision unilatérale par laquelle l’employeur met fin  au contrat qui le lie au travailleur[25], il ne peut être pris que pour un motif valable lié à l’aptitude ou à la conduite du travailleur sur le lieu du travail et dans l’exercice de ses fonctions.

Cela étant, on peut alors distinguer le licenciement à la suite de la conduite du travailleur sur son lieu de travail et dans l’exercice de ses fonction, du licencient lié à l’aptitude du travailleur.

  • Le licenciement fondé sur la conduite du travailleur

La conduite du travailleur, c’est sa manière de se comporter qui se traduit par des actes et des agissements. Il s’agit d’actes positifs ou par omission que le travailleur pose au sein de l’entreprise, dans les rapports avec ses supérieurs et ses collègues[26].

Mais, sauf si les actes de la vie privée ont un impact sur le travail ou sur la réputation de l’entreprise, aucun travailleur ne peut faire l’objet de licenciement pour des actes de la vie privée[27].

Les fautes  de conduite susceptibles de donner lieu au licenciement peuvent figurer dans le règlement d’entreprise ou dans la convention collective.

Il peut s’agir de retards occasionnel, de manque de respect au personnel dirigeant, d’oublie de pointer[28]. Quoi qu’il en soit, nous retenons trois types des fautes pouvant toutes amener au licenciement, à savoir :

  • La faute simple

Elle  est un comportement fautif du salarié pendant l’exercice de son contrat de travail. Elle ouvre droit au versement d’une indemnité de licenciement et à un préavis pour le salarié qui en fait l’objet.

À noter que le salarié peut faire l’objet d’une dispense de travail et continuer d’être rémunéré chaque mois jusqu’à échéance de son préavis.

Dans ce cas, l’employeur et le salarié sont tous deux chargés de prouver l’existence des faits et charges avancés.

  • La faute grave

Elle affecte négativement la poursuite de la collaboration, qu’elle soit commise dans le cadre d’un contrat à durée déterminée, d’un contrat à durée indéterminée ou durant la période de préavis.

C’est d’ailleurs le critère à prendre en considération lorsque l’employeur évoque le licenciement de son employé.

En effet, il doit notamment évaluer si le contrat de travail peut être poursuivi durant le préavis, compte tenu des faits reprochés.

Dans ce cas, seul l’employeur doit être en mesure de prouver la réalité de la faute, son imputabilité et son degré de gravité.

  • La faute lourde

Elle constitue un acte commis délibérément par le salarié, avec une intention de nuire à l’employeur ou à son entreprise. Le licenciement pour faute lourde prive ainsi le salarié de toute indemnité et le dispense de préavis, sa présence étant rendue impossible dans l’entreprise[29].

Rappelons que le licenciement pour motif personnel ne trouve pas forcément
son fondement dans la commission d’une faute.

On parle alors de licenciement pour motif non-disciplinaire, ou pour comportement non-fautif. Il peut s’agir d’une inaptitude physique ou non du salarié au poste attribué avec impossibilité de reclassement.

Dans ce cas, le salarié licencié n’est pas visé par une faute, et c’est la médecine du travail qui acte son incapacité de travail.

  • Le licenciement lié à l’aptitude du travailleur

L’aptitude dans ce cas d’espèce peut être entendue comme la capacité acquise et reconnue pour exercer un métier.

Et se fondant sur la doctrine, qui voit dans l’aptitude en droit du travail, deux aspects, à savoir l’aspect physique et l’aspect professionnel[30], l’employeur peut donc licencier un travailleur qu’il juge inapte physiquement (constaté médicalement par un certificat médical délivré par un médecin)[31] ou professionnellement, c’est-à-dire l’absence des compétences ou des dispositions du travailleur à s’acquitter efficacement de sa tache.

Cependant, lorsqu’il jamais été reproché au travailleur une inaptitude à remplir ses fonctions dans le passé et qu’au contraire l’employeur lui a même accordé une gratification pour récompenser ses efforts fournis au cours d’une année, le cas isolé d’inaptitude dont il aurait fait preuve par la suite ne peut justifier son licenciement[32].

  • Le licenciement collectif : motifs

Lorsqu’une entreprise travers des moments de difficultés économiques, elle peut licencier les salariés.

Cependant, avant tout licenciement, l’entreprise doit mettre en œuvre des mesures permettant d’éviter le licenciement du salarié (adaptation, reclassement, etc.)[33].

En fait, le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l’intéressé sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu’il occupe ou sur un emploi équivalent ne peut être réalisé dans le cadre de l’entreprise ou, le cas échéant, dans les entreprises du groupe auxquelles l’entreprise appartient[34].

De ce fait, l’on comprend que le licenciement collectif a pour motif principal les difficultés financières dont l’entreprise ou l’employeur fait face.

Ce licenciement collectif qui se fonde sur le besoin de fonctionnement de l’entreprise, autrement appelé licenciement massif, n’est pas défini par le Code du travail.

Cependant l’Arrêté sur départemental du 19 septembre 1974 fixant les
modalités d’application des articles 48 et 64 du Code du travail (licenciements massifs, licenciements fondés sur les nécessités du fonctionnement et licenciements fondés sur des raisons économiques), comme étant les licenciements opérés sur base des articles 62 et 78 du Code du travail, lorsqu’ils entrainent au cours d’un mois, le départ de l’entreprise d’au moins :

  • 4 travailleurs pour un établissement n’occupant pas plus de 20 travailleurs ;
  • 10 travailleurs pour un établissement occupant de 21 à 100 travailleurs ;
  • 30 travailleurs pour un établissement occupant de 101 à 500 travailleurs ;
  • 50 travailleurs pour un établissement occupant de 501 à 1.000 travailleurs ;
  • 100 travailleurs pour un établissement occupant de 1.001 à 2.000 travailleurs ;
  • 200 travailleurs pour un établissement occupant de 2.001 à 4.000 travailleurs ;
  • 250 travailleurs pour un établissement occupant de 4.001 à 6.000 travailleurs ;
  • 300 travailleurs pour un établissement occupant plus de 6.000 travailleurs[35].

Par ailleurs, l’article 78 de la loi du 25 octobre 2002 portant Code du travail interdit clairement le licenciement massif, sauf dérogations éventuelles déterminées par un arrêté du ministre du travail et la prévoyance sociale.

Aussi il nous faut noter que le Code du travail ne fait pas de distinction entre les raisons économiques et les nécessités du fonctionnement de l’entreprise.

Cependant, il ressort de l’article 62 du Code du travail que le licenciement peut résulter d’un motif valable lié à la conduite ou à l’aptitude du travailleur ou aux nécessités de fonctionnement de l’entreprise ; tandis que l’article 78 prévoit l’hypothèse du licenciement massif pour des raisons économiques.

  • En droit comparé (en droit allemand)

Le licenciement  « Kündigung » par une société allemande ou française d’un salarié employé en  Allemagne n’est pas aussi strictement règlementé qu’en France par exemple. Si l’entreprise n’emploie pas plus de dix salariés, elle peut même licencier un salarié librement sans indication de motif.

Pour les entreprises de plus de dix salariés la loi allemande sur la protection contre les licenciements sans motif réel « Kündigungsschutzgesetz » s’applique.

Cette loi prévoit qu’un motif de licenciement doit exister pour justifier un licenciement[36].

On retient donc que le droit du travail allemand organise les types de licenciement en se fondant sur les causes desdits licenciements, à savoir : les fautes graves tenant au comportement du travailleur et en raison d’une diminution de la capacité à travailler du salarié, qui donnent lieu à un licenciement ordinaire, avec effet immédiat ou encore le licenciement de reclassement.

Ainsi, on remarque que les causes de licenciement en droit du travail allemand sont connexes à celles en droit du travail congolais ; même si les conséquences ne sont pas les mêmes.

Section 2 : Analyse explicative du licenciement

            Au sens de la convention sur le licenciement 1982 de l’Organisation internationale du travail, le licenciement est une cessation de la relation de travail sur l’initiative de l’employeur[37].

Autrement dit, le licenciement constitue la décision unilatérale par laquelle l’employeur met fin au contrat qui lie au travailleur[38].

Comme on l’avait déjà évoqué, le licenciement est bien réglementé en République démocratique du Congo même s’il pose la question dans notre étude sur l’existence d’une procédure juridique et légale quant à ce.

Et cela revient donc à dire qu’il existe tant dans l’arsenal juridique congolais, qu’ailleurs, une réglementation stricte de cette matière.

Raison pour laquelle cette section portera sur l’analyse du cadre légal du licenciement en droit congolais (§1) et du cadre légal et institutionnel en droit allemand (§2).

§1. Cadre légale et institutionnel du licenciement en droit congolais

Le législateur congolais ne s’est pas limité à prévoir une réglementation juridique du licenciement, mais a par ailleurs prévue quelques institutions intervenant ainsi pour contrôler la régularité du licenciement.

Ce faisant, il nous faut passer en revue à ce stade, le cadre juridique du licenciement en droit congolais (A), avant d’aborder le cadre institutionnel du licenciement tel que prévu par la loi et leurs modalités d’intervention en cas de licenciement (B).

  1. Cadre légal

La réglementation du travail en général et de licenciement en particulier date de 1967, année de la prise de l’Ordonnance-loi 67-310 du 9 août 1967 portant Code du travail. Apres cette période, plusieurs règlements s’en sont suivis pour matérialiser certaines dispositions de ladite ordonnance.

C’est dans cette optique que ce point s’évertuera à retracer l’évolution de la réglementation du licenciement selon la période d’avant 2002, date de la promulgation du code du travail en vigueur (1) et la période d’après 2002 jusqu’à nos jours (2).

  1. Licenciement avant 2002

Dans ce paragraphe, nous allons analyser essentiellement le contenu de l’Ordonnance-loi 67-310 du 9 août 1967 portant Code du travail en ce qui concerne son aspect de la réglementation du licenciement (a), ainsi que le contenu de l’Arrêté Ministériel n° 69/0024 sur les modalités de déclaration de l’embauchage et du départ d’un travailleur, pour ce qui est du licenciement (b), l’Arrêté ministériel n° 018/90 du 1er septembre 1990portant Levée de la mesure de suspension provisoire octroi d’autorisation de licenciements des travailleurs (c) et l’Arrêté ministériel n° 036/95 du 21 juin 1995portant Recours judiciaire contre la décision de l’inspecteur du travail en cas de licenciement ou de mutation d’un délégué titulaire ou suppléant (d).

  1. L’Ordonnance-loi 67-310 du 9 août 1967 portant Code du travail

Ce texte juridique constituait la b ase de droit du travail avant 2002. Il organisait tout sur le droit du travail, entre autre les modalités de la formation du contrat de travail, de son exécution, de sa suspension et de sa résiliation.

Contrairement au Code du travail en vigueur, qui regorge en son sein tant les règles sur le contrat du travail, sur la résolution des litiges que sur la sécurité sociale, cette Ordonnance-loi se penchait sur l’organisation du travail sous son aspect rapports individuel du travail.

Elle était donc  complété par d’autres instruments juridiques, notamment l’Arrêté ministériel n° 3/68 du 9 janvier 1968 sur les Droits et obligations des employeurs et des travailleurs parties à un conflit collectif du travail, l’Arrêté ministériel n°036/95 du 21 juin 1995portant Recours judiciaire contre la décision de l’inspecteur du travail en cas de licenciement ou de mutation d’un délégué titulaire ou suppléant,  le Décret-loi organique du 29 juin 1961sur la sécurité sociale, etc.[39]

  • Contenu de l’Arrêté Ministériel n° 69/0024 sur les modalités de déclaration de l’embauchage et du départ d’un travailleur[40]

Comme l’indique son intitulé, cet arrêté a été pris par le ministre ayant dans ses attributions le travail et la prévoyance sociale dans le but de contrôler les mouvements d’embauchage et du départ des travailleurs, peu importe le mode dudit départ (démission, licenciement, etc.).

En effet, aux termes de ce texte réglementaire, et pour ce qui nous concerne, il est prévu que tout licenciement quelque cause que ce soit doit faire l’objet d’une déclaration établie dans les 48 heures par l’employeur[41].

Cette obligation avait pour objectif d’une part, pour l’Etat, de décourager le licenciement abusif dans la mesure où l’employeur devrait rédiger quatre exemplaires dont un de ces exemplaires datés et signés doit être adressé ou déposé
sous pli fermé à l’inspection du travail géographiquement compétente et dans les mêmes conditions, deux de ces exemplaires doivent être adressés au responsable provincial de l’emploi. Le quatrième exemplaire est conservé par le déclarant pour être présenté, sur demande, aux Inspecteurs et contrôleurs du travail en cas de contrôle[42].

D’autre part, cette modalité du dépôt d’un des exemplaires au responsable provincial d’emploi avait pour mobile selon nous de l’identification des chalumeurs pour adopter une politique d’emploi conséquente.

Cette obligation, dans le cadre du Code du travail en vigueur, est prévue à l’article 217 du Code de travail.

  • Contenu de l’Arrêté ministériel n° 018/90 du 1er septembre 1990 portant  Levée de la mesure de suspension provisoire octroi d’autorisation de licenciements des travailleurs[43]

Cet acte réglementaire avait pour but de suspendre l’octroi d’autorisation de licenciement des travailleurs prise en date du 22 février 1990 par l’arrêté du 22 février 1990 qui est abrogé.

Cette autorisation concerne le licenciement des délégués titulaires ou suppléants
envisagé par l’employeur ainsi que toute mutation faisant perdre la qualité de délégué qui devrait être soumis à la condition suspensive de leur approbation par l’inspecteur du travail du ressort.

  • Contenu de l’Arrêté ministériel n° 036/95 du 21 juin 1995 portant Recours judiciaire contre la décision de l’inspecteur du travail en cas de licenciement ou de mutation d’un délégué titulaire ou suppléant[44]

Cet instrument est la conséquence de la levée de la suspension sur l’autorisation de licenciement des travailleurs que nous venons d’analyser précédemment.

En effet, selon les termes de cet instrument, pour toute décision sur la demande d’autorisation de licenciement ou de mutation d’un délégué titulaire ou suppléant,
sous peine de nullité, l’inspecteur du travail du ressort procède au préalable à une enquête contradictoire ; les parties sont entendues et, en cas de besoin, assistées d’un représentant de leurs organisations professionnelles, d’un travailleur appartenant à la même branche d’activité économique ou d’un avocat[45].

Cet instrument du ministère du travail et de la prévoyance sociale donne redonne la possibilité au délégué principal ou de son suppléant licencié ou muté, après recours hiérarchique, de saisir la cour d’appel de son ressort pour un recours judicaire[46].

  • Licenciement après 2002

A partir de 2002 avec la promulgation de la loi du 25 octobre 2002 portant Code du travail, le licenciement est organisé selon qu’il s’agit de licenciement individuel (a) et de licenciement collectif ou économique (b).

  1. Cadre juridique du licenciement individuel depuis 2002

Le fondement du licenciement individuel est l’article 62 du Code du travail qui prévoit deux types, à savoir le licenciement fondé sur l’aptitude  du travailleur, autrement dit, sur son incompétence au travail et le licenciement lié à la conduite du travailleur sur les lieux de travail dans l’exercice de ses fonctions, qui peut résulter d’une faute légère, grave et lourde.

Pour ce qui est de la procédure du licenciement individuel, il fera objet de notre analyse dans le second chapitre.

  • Cadre juridique du licenciement collectif depuis 2002

Depuis 2002, le licenciement est organisé par rapport aux nécessités de fonctionnement de l’entreprise et pour des motifs économiques.

  • Contenu de l’article 62 de la loi du 25 octobre 2002 portant Code du travail

Aux termes de cette disposition, le législateur congolais de 2002 a prévu que le contrat à durée indéterminée ne peut être résilié à l’initiative de l’employeur que pour un motif valable lié à l’aptitude ou à la conduite du travailleur sur les lieux de travail dans l’exercice de ses fonctions ou fondé sur les nécessités du fonctionnement de l’entreprise, de l’établissement ou du service.

Cette disposition constitue le fondement même du licenciement fondé sur les nécessités du fonctionnement de l’entreprise.

Cependant, la régularité de ce licenciement, car toute réorganisation d’entreprise n’est pas de nature à constituer un motif économique de licenciement.

Initialement, la Cour de cassation française exigeait qu’elle soit décidée dans    « l’intérêt de l’entreprise »[47], elle a ensuite retenu le critère plus restrictif de « la sauvegarde de la compétitivité » de l’entreprise.

Ainsi, la seule prise en compte de l’intérêt général de l’entreprise sans lien avec la
sauvegarde de sa compétitivité ne sera pas suffisant pour justifier un licenciement économique[48].

De ce qui précède, on peut retenir que la réorganisation de l’entreprise basée sur la sauvegarde de la compétitivité constitue un motif économique de licenciement lorsqu’elle est mise en œuvre pour prévenir des difficultés économiques à venir et leurs conséquences sur l’emploi.

Cette disposition consacre aussi le licenciement fondé sur l’aptitude ou à la conduite du travailleur sur les lieux de travail dans l’exercice de ses fonctions.

  • Contenu de l’article 78 de la loi du 25 octobre 2002 portant Code du travail

Cette disposition prévoit la possibilité pour le ministre ayant le travail et la prévoyance sociale dans ses attributions de rendre possible le licenciement économique, qui en principe est interdit.

Ces difficultés économiques peuvent avoir pour causes notamment :

  • La conjoncture ;
  • La mutation technologique ;
  • La réorganisation de l’entreprise pour sauvegarder sa compétitivité telle que prévue à l’62 du Code du travail ;
  • La cessation d’activité des activités de l’entreprise.
  • Cadre institutionnel

Sur le plan institutionnel, le droit congolais prévoit trois institutions principales pouvant intervenir et procéder au contrôle de la régularité du licenciement.

En effet, il est de principe qu’en cas de licenciement sans motif valable, le travail a droit d’être réintégrer. On sous-entend à ce stade l’intervention d’une institution, à savoir l’inspection du travail (1).

Cependant le droit congolais prévoit qu’à défaut de la réintégration du travailleur victime d’un licenciement abusif, une autre institution intervienne, à savoir le Tribunal du travail (2) pour fixer les dommages-intérêts que l’employeur devra payer à son travailleur comme indemnité pour rupture abusive.

A côté de ce licenciement individuel, se trouve le licenciement collectif ou pour motif économique qui, outre sa réglementation par le Code du travail, l’est d’avantage par la réglementation du Ministre ayant dans ses attributions le travail et prévoyance sociale (3).

  1. L’inspection du travail[49]

De prime à bord, l’inspection du Travail a pour mission de :

  • assurer l’application des dispositions légales relatives aux conditions de travail et à la protection des travailleurs dans l’exercice de leur profession, telles que les dispositions relatives à la durée du travail, aux salaires, à la sécurité, à l’hygiène et au bien-être, à l’emploi des femmes, des enfants et des personnes avec handicap, aux conflits collectifs, aux litiges individuels du travail, à l’application des conventions collectives, à la représentation du personnel et d’autres matières connexes ;
  • fournir des informations et des conseils techniques aux employeurs et aux travailleurs sur les moyens les plus efficaces d’observer les dispositions légales ;
  • donner des avis sur les questions relatives à l’établissement ou à la modification des installations d’entreprises et d’organismes soumis à une autorisation administrative ; et
  • porter à l’attention de l’autorité compétente les déficiences ou les abus que révélerait l’application des dispositions légales et qui ne sont pas couverts par celles-ci[50].
  • Les Tribunaux du Travail

Ces juridictions spécialisées, mais sous l’autorité de la Cour de cassation, coiffant ainsi toutes les juridictions d’ordre judiciaire, ont été créées par la loi n°016-2002 du 16 octobre 2002 portant création, organisation et fonctionnement des tribunaux du travail.

Elles connaissent des litiges individuels survenus entre le travailleur et son employeur dans ou à l’occasion du contrat de travail, des conventions collectives ou de la législation et de la réglementation du travail et de la prévoyance sociale[51].

Pour ce qui concerne leur saisine, il nous faut mentionner que les litiges individuels de travail ne sont recevables devant les Tribunaux du travail que s’ils ont été préalablement soumis à la procédure de conciliation à l’initiative de l’une des parties devant l’Inspecteur du travail du ressort[52].

Tandis que les conflits collectifs de travail ne sont recevables devant les Tribunaux du travail que s’ils n’ont été préalablement soumis à la procédure de conciliation et à la procédure de médiation prévue par le Code du travail[53].

§2. Cadre légal et institutionnel du licenciement en droit comparé (droit allemand)

D’entrée de jeu, en droit allemand du travail, la fin des relations de travail sur l’initiative de l’une ou de l’autre partie, est régie par le Code civil allemand.

La protection du travailleur contre le licenciement est garantie par plusieurs lois du travail, selon la nature du licenciement[54].

Le droit du travail allemand établit une distinction entre le licenciement sans préavis du licenciement avec préavis. Certaines lois protègent contre les deux formes  de licenciement mais ne s’appliquent qu’à des groupes particuliers de travailleurs[55].


[1] J. MASANGA PHOBA MVIOKI, Droit congolais du travail, Paris, L’Harmattan, 2015, p. 157.

[2] J. MASANGA PHOBA MVIOKI,  Idem.

[3] MANGWAYA BUKUKU,  « L’obligation de motif valable et de préavis dans la résiliation du contrat de travail », in Congo-Afrique, N°58, Kinshasa, p. 463.

[4]  Gh. JAGENEAU, Bref aperçu du Droit congolais du travail, Likasi, Editions SHALAMO, 2001, p. 16.

[5] J-M. KUMBU ki NGIMBI, Op.cit., p. 24.

[6] Article 321, point 1 du Code du travail français de 1989.

[7] M. NZANGI BATUTU, Droit de la rupture du contrat de travail : principes, motifs, procédures et sanctions, Kinshasa, CDPS, 2017, Avant propos.

[8]https://www.partena-professional.be/fr/knowledge-center/infoflaches/importance-du-motif-de-licenciement-pour-lemployeur-et-le-travailleur Consulté le 07 mai 2019, à 11h25.

[9] Gh. JAGENEAU, Op.cit., p. 16.

[10] Cfr contenu du lien : https://www.frontaliers-grandest.eu/fr/salaries/france-allemagne/droit-du-travail-1/la-rupture-du-contrat-de-travail.1 consulté le 07/05/2019 à 12h25.

[11] Il n’existe pour ce cas que trois types de motifs, à savoir : les motifs tenant aux comportements, les motifs tenant à l’aptitude du salarié à travailler, et les motifs tenant aux résultats de l’entreprise.

[12] Entre autres les fautes graves tenant au comportement du travailleur et en raison d’une diminution de la capacité à travailler du salarié

[13] En fait le travail peut soit : accepter sans condition le nouvel emploi ou la modification du contrat de travail proposé par l’employeur ; et dans ce cas, la relation de travail se poursuit dans les nouvelles conditions acceptées par le salarié ; Il peut aussi accepter le nouveau contrat à condition que le Tribunal du travail considérer que cette proposition patronale soit justifiée ; et dans ce deuxième cas, l’issue dépend de la décision du Tribunal ; enfin, il peut refuser l’offre patronale ; ce qui conduit à un licenciement.

[14] Article 63 alinéas 2 de la Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail telle que modifiée et complétée par la loi n° 16/010 du 15 juillet 2016, in JO RDC, Numéro spécial, 57ème année, 29 juillet 2016.

[15] Convention Genève du 02 juin 1982 sur la cessation de la relation de travail sur l’initiative de l’employeur, entrée en vigueur en 1985.

[16] J. MASANGA PHOBA MVIOKI,  Op.cit., p. 170.

[17] A. ILOKI, Le droit du licenciement au Congo, Paris, L’Harmattan, 1ère édition, 2000, Avant-propos.

[18] D. GRANDGUILLOT, Droit du travail et de la sécurité sociale, Paris, 6ème édition, GUALINO, 2003, p. 87.

[19] J. MASANGA PHOBA MVIOKI,  Op.cit., p. 168.

[20] J-M. KUMBU ki NGIMBI, Op.cit., p. 49.

[21] S. GUINCHARD et T. DEBARD, Op.cit., p. 396.

[22] J-M. KUMBU ki NGIMBI, Op.cit., p. 24.

[23] « Tout contrat de travail peut être résilié immédiatement sans préavis, pour faute lourde ». Article 72 alinéas premier.

[24] Article 70 alinéas 2 de la Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail telle que modifiée et complétée par la loi n° 16/010 du 15 juillet 2016, in JO RDC, Numéro spécial, 57ème année, 29 juillet 2016.

[25] J. MASANGA PHOBA MVIOKI,  Op.cit., p. 170.

[26] Ces actes positifs et ou négatifs (abstentions volontaires) doivent constituer des manquements au devoir, à la morale, au contrat, à la loi et d’une manière générale, doivent constituer des fautes de conduite pour être retenus comme motif de licenciement.

[27] J. MASANGA PHOBA MVIOKI, Op.cit., p. 170.

[28] LUWENYEMA LULE, Précis de droit du travail zaïrois, Kinshasa, éd. LULE, 1989, p. 414.

[29] Article 72 alinéas 1er de la Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail telle que modifiée et complétée par la loi n° 16/010 du 15 juillet 2016, in JO RDC, Numéro spécial, 57ème année, 29 juillet 2016.

[30] LUWENYEMA LULE, Op.cit., p. 418.

[31] Article 38 alinéas 3 de la Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail telle que modifiée et complétée par la loi n° 16/010 du 15 juillet 2016, in JO RDC, Numéro spécial, 57ème année, 29 juillet 2016.

[32] MUKA DI BONYI, Litige individuel du travail, Kinshasa, Chroniques de jurisprudence (1980-1995), Collection informations juridiques, 1997, p. 57.

[33] Gh. JAGENEAU, Op.cit., p. 20.

[34] D. GRANDGUILLOT, Op.cit., p. 96.

[35] Article 1er  de l’Arrêté départemental n° 11/74 du 19 septembre 1974 fixant les modalités d’application des articles 48 et 64 du Code du travail (licenciements massifs, licenciements fondés sur les nécessités du fonctionnement et licenciements fondés sur des raisons économiques), in Les Codes larcier de la RDC, Tome IV, droit du travail et de la sécurité sociale, p. 91.

[36] ULRICH MARTIN, « le licenciement d’un salarié en Allemagne » in Epp & kühl, Strasbourg, 2012,  p. 2.

[37] Convention Genève du 02 juin 1982 sur la cessation de la relation de travail sur l’initiative de l’employeur, entrée en vigueur en 1985.

[38] J. MASANGA PHOBA MVIOKI,  Op.cit., p. 170.

[39] Cfr Les Codes Larcier, Tome IV : Droit du travail et de la sécurité sociale, table des matières.

[40] Les Codes Larcier, Tome IV : Droit du travail et de la sécurité sociale, p. 45.

[41] Article 1er alinéas 2 de l’Arrêté Ministériel n° 69/0024 sur les modalités de déclaration de l’embauchage et du départ d’un travailleur, in Les Codes larcier de la RDC, Tome IV, droit du travail et de la sécurité sociale, p. 45.

[42] Article 2, de l’Arrêté Ministériel n° 69/0024 sur les modalités de déclaration de l’embauchage et du départ d’un travailleur, in Les Codes larcier de la RDC, Tome IV, droit du travail et de la sécurité sociale, p. 45.

[43] Les Codes Larcier, Tome IV : Droit du travail et de la sécurité sociale, p. 92.

[44] Les Codes Larcier, Tome IV : Droit du travail et de la sécurité sociale, p. 110.

[45] Article 1er de l’ l’Arrêté ministériel n° 036/95 du 21 juin 1995portant Recours judiciaire contre la décision de l’inspecteur du travail en cas de licenciement ou de mutation d’un délégué titulaire ou suppléant, in Les Codes Larcier, Tome IV : Droit du travail et de la sécurité sociale, p. 110.

[46] Article 7, Idem.

[47] Cass. Soc. 1er avril 1992, n° 90-44697, trouvé sur http://www.rupture-pour-motif-de-reorganisation-entreprise-097  le 09 mars 2019 à 7h11

[48] Idem.

[49] Cfr contenu de l’Ordonnance n° 14/080 du 08 décembre 2014 portant règlement d’administration relatif au personnel de l’inspection générale du travail, IGT en sigle.

[50] Article 187 de la Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail telle que modifiée et complétée par la loi n° 16/010 du 15 juillet 2016, in JO RDC, Numéro spécial, 57ème année, 29 juillet 2016.

[51] Article 15 de la Loi n°016-2002 du 16 octobre 2002 portant création, organisation et fonctionnement des tribunaux du travail.

[52] Article 24, Idem.

[53] Article 27, Ibidem.

[54] Il peut s’agir du licenciement ordinaire, du licenciement avec effet immédiat ou du licenciement par reclassement.

[55] ORGANISATION INTERNATIONALE DU TRAVAIL, « Présentation du droit du travail de la République fédérale d’Allemagne », in www.ilo.org consulté le 07/05/2019 à 15h00.

CHAPITRE 2 : LA PROCEDURE DU LICENCIEMENT EN DROIT CONGOLAIS DU TRAVAIL : INSUFFISANCES ET CORRECTIFS

Comme nous l’avions démontré dans le premier chapitre, la rupture du contrat de travail peut s’inscrire dans des contextes très variés, à l’initiative de l’employeur, du salarié, voire des deux parties.

En fait, différents régimes ont été imaginés par le législateur congolais afin d’encadrer les pratiques, instaurer des garanties (de fond et de forme) et des protections pour chacun (si les parties ne sont pas égales dans la relation de travail, le contrat oblige bien à des obligations réciproques et chacun engage sa responsabilité dans son exécution et ses suites)[1].

Concernant notre sujet qui porte sur la procédure du licenciement, nous aborderons dans ce second chapitre la procédure du licenciement selon le droit positif congolais (Section 1), et chuterons avec l’analyse critique de cette procédure ; tout en proposant quelques correctifs quant à ce (Section 2).

Section 1 : Procédure du licenciement en droit positif congolais

Comme nous l’avion démontré dans le premier chapitre, de manière générale le licenciement est une résiliation du contrat de travail à durée indéterminée par l’employeur.

En fait, pour licencier, l’employeur doit observer une procédure et il n’a le droit de le faire que pour une cause réelle et sérieuse[2].

Par ailleurs, la procédure de licenciement varie, suivant qu’il s’agit d’un licenciement pour motif personnel, autrement dit, pour des motifs inhérents à la personne du salarié (§1) ou d’un licenciement pour motif économique (§2).

§1. Procédure du licenciement individuel

Ce licenciement étant d’un seul salarié par opposition au licenciement collectif, il ressort de la lecture de l’article 72 de la Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail telle que modifiée et complétée par la loi n° 16/010 du 15 juillet 2016 que le licenciement individuel nécessite le respect d’une procédure qui se décompose en trois étapes, à savoir : la notification au travailleur de l’intention du licenciement de la part de l’employeur (A), l’audition du salarié (B) et la notification du licenciement (C), qui est souvent suivi du paiement de l’indemnité de la résiliation en cas d’incapacité professionnelle (D), outre la procédure spéciale tenant à la qualité de salarié protégé et le représentants du personnel (E).

  1. La notification au travailleur de l’intention du licenciement

Cette étape n’est possible qu’en cas de faute lourde commise par le salarié ; elle est prévue à l’article 72 qui prévoit que « pour besoin d’enquête, l’employeur a la faculté de notifier au travailleur, dans les deux jours ouvrables après avoir eu connaissance des faits, la suspension de ses fonctions »[3].

Le législateur congolais poursuit  en précisant que « l’écrit peut être soit adressé par lettre recommandée à la poste, soit être remis à l’intéressé contre accusé de réception ou, en cas de refus, en présence de deux témoins lettrés »[4].

Il sied de noter que ce formalisme s’impose et ne peut pas être suppléé, il est le moyen légal de prévenir toute contestation sur la date de notification du licenciement[5].

Dans la pratique, quelques mentions figurent d’une manière ou d’une autre dans cette notification pour la rendre plus claire, entre autres :

  • L’objet de la notification dans la mesure où le salarié doit être informé que l’employeur envisage son licenciement, c’est une mention substantielle qui conditionne la validité de la procédure toute entière ;
  • La date, l’heure et le lieu de l’audition qui s’en suivra ;
  • Le rappel que le salarié peut se faire assister pour cet entretien par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise ou, en l’absence d’institutions représentatives dans l’entreprise, par un conseiller du salarié[6].
  • L’audition du salarié

Cette étape est celle qui doit suivre la notification logiquement. Il sied de noter que cette étape n’est pas expressément prévue par le code du travail, m           ais constitue une étape logique dans la mesure où le salarié accusé de faute lourde aura tendance à se défendre et à s’expliquer avant que l’employeur ne matérialise sa décision de licenciement du salarié mis en cause.

Quoi qu’il en soit, dans la pratique doit respecter le délai de quinze jours qui commence à courir à partir de la réception de la notification du licenciement par le salarié.

En d’autres termes, cette étape doit intervenir dans les quinze jours, faute de quoi la procédure serait irrégulière.

En droit du travail allemand, le salarié est généralement convoqué pendant ses heures de travail, il est aussi admis que l’entretien soit tenu en dehors du temps de travail, notamment pour les salariés ayant des horaires spécifiques ; en ce cas, il est nécessaire de payer au salarié le temps passé à l’entretien comme temps de travail effectif et de l’indemniser du préjudice subi[7].

L’entretien se déroule en principe au siège social de l’entreprise ou là où s’exécute normalement le travail ; l’employeur peut organiser celui-ci en un autre lieu mais il devra pouvoir justifier de la légitimité de son choix et rembourser au salarié les frais de déplacement éventuellement exposés[8].

Ces pratiques sont des fois observées en droit congolais du travail dans la pratique, mais contrairement au droit allemand, elles ne sont pas prévues par la loi, mais sont fruits d’usage.

  • La notification du licenciement

Cette étape n’est possible que si l’employeur est resté sur sa position suite à l’audition préalable du salarié et décide de le licencier, et dans cette hypothèse  il a l’obligation de le notifier au salarié par lettre recommandée avec avis de réception[9] ; car un licenciement ne peut en aucun cas être signifié verbalement, il serait dès lors irrégulier et privé de cause réelle et sérieuse.

Cette lettre doit indiquer  clairement le ou les motifs de la rupture, la décision de l’employeur est motivée : il s’agit d’une obligation fondamentale car la lettre de licenciement fixe les limites du litige éventuel[10].

En droit allemand, l’absence de motif ou en présence de motifs imprécis (ou motif totalement subjectif) le licenciement est réputé sans cause réelle et sérieuse. Ainsi les motifs doivent être énoncés clairement, précisément, de manière objective et
vérifiable[11].

Nous retenons aussi que la date de notification du licenciement marque le point de départ de la période de préavis qui, la durée et les conditions sont fixées par Arrêté du Ministre ayant le Travail et la Prévoyance Sociale dans ses attributions, pris après avis du Conseil National du Travail, à défaut d’une Convention collective prévoyant des conditions plus avantageuses[12].

  • L’indemnité de la résiliation

Cette étape exceptionnelle n’est possible qu’au cas où le salarié licencié l’est à la suite d’une maladie, qui a perduré plus de six mois de suspension du contrat.

En effet, le législateur congolais exclut d’abord la maladie du salarié des causes de la résiliation du contrat dans le but de le protéger ; ensuite, il préserve aussi les intérêts de l‘employeur qui peut être préjudicié avec cette maladie au cas où elle perdure.

C’est dans ce cadre qu’il prévoit « qu’il ne peut être mis fin à un contrat pendant qu’il est suspendu, sous les réserves du cas de maladie ou d’accident, hormis le cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle, l’employeur peut notifier au travailleur la résiliation du contrat après six mois ininterrompus d’incapacité d’exécuter celui-ci.

Le contrat prend fin le lendemain de la notification de la résiliation. Dans ce cas, l’employeur est tenu au paiement d’une indemnité de résiliation correspondant au préavis dû en cas de contrat à durée indéterminée »[13].

Outre cette indemnité spécifique pour les maladies entrainant la résiliation du contrat de travail, l’employeur doit en principe verser diverses indemnités au salarié en cas de licenciement (cela est valable pour tous types de licenciement : individuel et économique).

Il s’agit de :

  • L’indemnité compensatrice de préavis si les conditions requises sont remplies[14] ;
  • L’indemnité compensatrice de congés payés si le salarié n’a pas soldé la totalité de ses droits[15] ;
  • L’indemnité de licenciement qui peut être légale, conventionnelle ou contractuelle (la plus favorable au salarié étant préférée)[16].

Par ailleurs, le motif du licenciement peut toutefois remettre en cause le versement de certaines indemnités, c’est le cas du licenciement pour faute grave ou lourde.

  • Procédure spéciale tenant à la qualité de salarié protégé/ représentants du personnel

De manière générale, tout licenciement envisagé par l’employeur d’un représentant du personnel titulaire ou suppléant, délégué du personnel, membre du comité d’entreprise est obligatoirement soumis à la procédure spéciale posée par les articles 258 de la loi sous examen ; peu importe la nature de son contrat de travail.

En fait, il ressort de la lecture de cette disposition que tout licenciement d’un délégué titulaire ou suppléant envisagé par l’employeur ou son représentant ainsi que toute mutation faisant perdre la qualité de délégué sont soumis à la condition suspensive de leur approbation par l’Inspecteur du Travail du ressort.

En sus, la mesure prise ou envisagée par l’employeur doit être communiquée à l’Inspecteur du Travail par lettre au porteur ou lettre recommandée avec accusé de réception. L’Inspecteur du Travail doit notifier sa décision dans le mois à partir de la réception de la lettre de l’employeur.

La décision de l’Inspecteur du Travail est susceptible d’un recours judiciaire dans les conditions fixées par l’arrêté du Ministre ayant le Travail et la Prévoyance Sociale dans ses attributions, pris après avis du Conseil National du Travail.

Sauf faute lourde, la durée du préavis à observer en cas de licenciement d’un délégué titulaire ou suppléant est le double de la période applicable en vertu des dispositions de l’article 64 du présent code, sans pouvoir être inférieure à trois mois[17].

            Le régime protecteur concerne bien sûr le licenciement, mais également toute rupture à l’initiative de l’employeur, ainsi que la rupture conventionnelle, la fin de CDD. Laprotection est applicable pendant toute la durée du mandat(sauf dispositions conventionnelles différentes) à compter du jour de proclamation des résultats aux élections professionnelles.

Le droit du travail allemand va plus loin en prévoyant que cette protection peut s’acquérir pour un salarié demandeur d’organisation des élections professionnelles : il s’agit d’une protection d’une durée de six mois à compter de l’envoi à l’employeur de la lettre recommandée réclamant l’organisation des élections professionnelles.

Cela est également le cas pour les candidats déclarés aux élections professionnelles : la protection vaut alors pendant six  mois à compter de l’envoi par lettre recommandée des listes de candidatures (soit postérieurement à la signature du protocole d’accord pré-électoral)[18].

§2. Procédure du licenciement massif (économique)

Contrairement au motif individuel personnel, qui entraine au licenciement individuel, le motif économique de licenciement, entrainant au licenciement massif fait l’objet d’une interdiction légale en principe ; et donc le licenciement économique en droit congolais est une exception.

En effet, il est prévu que « sauf dérogations éventuelles qui seront déterminées par un arrêté du Ministre ayant le Travail et la Prévoyance Sociale dans ses attributions, les licenciements massifs sont interdits »[19].

Exceptionnellement, « l’employeur qui envisage de licencier un ou plusieurs membres de son personnel pour des raisons économiques, notamment la diminution de l’activité de l’établissement et la réorganisation intérieure, doit respecter l’ordre des licenciements établi en tenant compte de la qualification professionnelle, de l’ancienneté dans l’établissement et des charges de famille du travailleur »[20].

            De ces prévisions légales, nous ressortons trois principales conditions pour que le licenciement économique soit établi, à savoir : d’abord cette rupture du contrat du travail ne doit pas avoir un lien avec la personne du salarié.

C’est à dire que la désignation des salariés concernés par cette mesure du licenciement économique doit résulter de l’application de critères d’ordre légaux ou conventionnels.

Ensuite, cette rupture du contrat de travail doit être  fondée sur une cause économique admise par la loi et aux conditions qui seront définies par un arrêté du Ministre ayant le Travail et la Prévoyance Sociale dans ses attributions[21].

Enfin, cette rupture doit résulter d’une cause ayant des effets directs sur l’emploi (suppression ou transformation) ou sur le contrat de travail (modification d’un élément essentiel refusé par le ou les intéressés).

            A la lumière du droit allemand du travail et de l’article 78 du Code du travail congolais sous examen, il nous semble que quatre conditions peuvent être mises en exergue pour ce qui est du licenciement pour motifs économiques, à savoir : les causes les difficultés économiques liées à la conjoncture (A), l’évolution technologique (B), la réorganisation de l’entreprise pour sauvegarder sa compétitivité (C) et la cessation d’activité (D).

  1. Procédure du licenciement massif lié aux difficultés économiques liées à la conjoncture

Le code du travail congolais n’a pas défini ce qu’une difficulté économique. Le législateur s’est limité à l’évoquer seulement comme la diminution de l’activité économique[22].

Cependant en comptabilité d’entreprise, on peut entendre par une difficulté économique :

  • Une baisse de commande ;
  • Une baisse du chiffre d’affaires ;
  • Des pertes d’exploitation ;
  • Une dégradation de la trésorerie ;
  • Une dégradation de l’excédent brut d’exploitation[23].

En droit français et allemand, ces causes doivent aussi être « sérieuses », c’est à dire que les difficultés devront de toute façon être suffisamment importantes et durables pour justifier la suppression d’un emploi ou la modification d’un contrat de travail[24].

Dans ce cas, la procédure veut que l’employeur respecte l’ordre des licenciements établi en tenant compte de la qualification professionnelle, de l’ancienneté dans l’établissement et des charges de famille du travailleur.

En vue de recueillir leurs suggestions, l’employeur doit informer par écrit, au moins quinze jours à l’avance, les représentants des travailleurs dans l’entreprise, des mesures qu’il a l’intention de prendre.

Ce qui fait que seront licenciés en premier lieu, les travailleurs présentant les moindres aptitudes professionnelles pour les emplois maintenus et, en cas d’égalité d’aptitudes professionnelles, les travailleurs les moins anciens, l’ancienneté étant majorée d’un an pour le travailleur marié et d’un an pour chaque enfant à charge[25].

Il sied de noter que ce licenciement a pour fondement le relèvement des activités de l’entreprise.

C’est pourquoi un le salarié licencié conserve pendant un an la priorité d’embauche dans la même catégorie d’emploi[26] au cas où l’entreprise parvenait à se relever économiquement.

  • Procédure du licenciement massif lié à la mutation technologique

En ce qui concerne la mutation technologique, l’article 78 ne fait nullement mention à la mutation technologique ; cependant, la doctrine estime que l’employeur peut invoquer les mutations technologiques pour justifier un licenciement pour
motif économique si ces dernières sont susceptibles d’entraîner :

  • une suppression ou une transformation d‘emploi ;
  • une modification d’un élément essentiel de son contrat de travail refusée par le salarié[27].

Dans ce cas, nous estimons que les salariés ne conservent pas forcément la priorité d’emplois durant un an comme c’était le cas avec le licenciement lié à la conjoncture dans la mesure où dans ce cas, le salarié est considéré comme incompétent quant aux nouveaux outils de travail, résultant de l’évolution de la technologie[28].

Et donc le critère de sélection des salariés concerné par ce licenciement est logiquement lié à leur connaissance et adaptation aux nouvelles technologies installées dans l’entreprise.

Cependant, nous estimons qu’il n’est pas exclut le fait pour l’employeur d’envisager à la place de ce licenciement, la formation d’adaptation de ses salariés à cette mutation technologique.

  • Procédure du licenciement massif lié à la réorganisation de l’entreprise pour sauvegarder sa compétitivité

Ce mode de licenciement n’existe pas en droit positif congolais ; mais dans la pratique, l’on se réfère au droit français  qui l’a puisé de sa jurisprudence ; cependant en droit français du travail, toute réorganisation d’entreprise n’est pas de nature à constituer un motif économique de licenciement.

Initialement, la Cour de cassation exigeait qu’elle soit décidée dans « l’intérêt de l’entreprise »[29], elle a ensuite retenu le critère plus restrictif de « la sauvegarde de la compétitivité» de l’entreprise.

Ainsi, la seule prise en compte de l’intérêt général de l’entreprise sans lien avec la sauvegarde de sa compétitivité ne sera pas suffisant pour justifier un licenciement économique[30].

De cette lecture jurisprudentielle française, il nous semble qu’en réalité, la réorganisation de l’entreprise basée sur la sauvegarde de la compétitivité constitue un motif économique de licenciement lorsqu’elle est mise en œuvre pour prévenir des difficultés économiques à venir et leurs conséquences sur l’emploi.

C’est pour cette raison que la jurisprudence française renchérit que le risque économique sur la compétitivité de l’entreprise est donc prévisible (il n’est pas nécessaire qu’il soit actuel), mais il doit être lui-même réel et sérieux[31] (menace importante à plus ou moins court terme, un risque éventuel ne suffisant pas).

Ainsi, l’entreprise ne peut pas licencier pour cause de réorganisation fondée sur la seule amélioration de sa rentabilité ou la volonté de faire des économies.

En cas de litige, les juges contrôlent si la compétitivité de l’entreprise était menacée et apprécient si la réorganisation opérée permettait de répondre à cette menace (ils ne se prononcent pas sur les choix de gestion de l’employeur, qui reste libre de choisir la solution la plus adaptée selon lui)[32].

  • Procédure du licenciement lié à la cessation d’activité

Il n’existe pas de définition générale de la cessation d‘activité mais il ressort des différentes conceptions comptables que celle-ci doit:

  • Etre définitive ;
  • Concerner l’entreprise elle-même et non pas l’une de ses unités seulement ;
  • Ne pas avoir pour origine une faute de l’employeur (du chef d’entreprise) (légèreté blâmable)[33].

En fait, la cessation d’activité est un motif autonome et logique  de licenciement économique qui ne nécessite donc pas de prouver que des difficultés économiques ou une sauvegarde de la compétitivité sont à l’origine de la fermeture de l’entreprise.

A cet effet, nous estimons que tant en droit congolais, que allemand, voire français, lorsque c’est la fermeture d’une partie de l’entreprise qui est envisagée, l’employeur doit fonder sa décision sur un des autres motifs de licenciement économique :

  • difficultés économiques ;
  •  mutations technologiques ;
  • nécessité de sauvegarder la compétitivité de l’entreprise.

A défaut, les licenciements prononcés pourront être reconnus dépourvus de cause réelle et sérieuse en cas de contestation.

Section 2 : Analyse critique de la procédure du licenciement et perspectives

A la lumière de ce qui précède, nous avions démontré comment le droit du travail s’efforce à protéger le salarié.

En effet, bénéficiant de nombreux droits, les salariés sont efficacement protégés par la loi, qui s’efforce de renforcer toujours davantage les procédures.

Certes, l’employeur conserve le pouvoir sur le plan économique, néanmoins, au niveau juridique, le rapport de force tend à basculer en faveur du salarié.

C’est ainsi que le droit de résiliation unilatérale de l’employeur n’est pas totalement discrétionnaire, ce dernier doit en effet, veiller à ne pas abuser de ce pouvoir.

Par conséquent,        avant toute décision aux conséquences lourdes tant sur le plan humain, social, financier, juridique, le chef d’entreprise doit se poser les bonnes questions : le droit du licenciement a-t-il vocation à s’appliquer ici ?[34]

La procédure du licenciement telle que nous l’avions précédemment abordé n’a été rien d’autre que l’ensemble des formalités qui doivent être suivies pour parvenir à un licenciement régulier et par conséquent, mérite à ce stade être critiqué en ce qui concerne le mode de sa prévision par le législateur congolais et la manière dont il est pratiqué à la fois par les employeurs en République démocratique du Congo et les tribunaux du travail saisis en contestation à cet effet (§1) ; et par la suite, nous proposerons des suggestions face au licenciement, principalement sous son aspect théorique et pratique (§2).

§1. Analyse critique du licenciement en droit congolais du travail

La cessation de la relation de travail sur l’initiative de l’employeur dans le cadre de l’exécution d’un contrat de travail à durée indéterminée est aujourd’hui un élément fondamental du droit du travail congolais.

En fait, l’élément déterminant de la rupture du contrat de travail à durée indéterminée étant la volonté unilatérale de l’une des parties, celle de l’employeur en matière de licenciement ne pouvait alors se fonder que sur les seules considérations liées au comportement du travailleur[35].

Et nous avions démontré d’autres aspects (motifs et procédures) à prendre en compte par l’employeur pour procéder à licenciement régulier.

De ce fait, nous allons procéder à ce niveau à l’analyse critique des garanties en matière de licenciement, accordées aux travailleurs, qui varient en considération de leur statut de travailleurs ordinaires (A) ou de salariés spécialement protégés (B).

  1. Analyse critique de la procédure du licenciement des travailleurs ordinaires en droit congolais du travail

Lorsque nous employons les mots « travailleurs ordinaires », il sied de préciser que c’est par opposition aux travailleurs membres de la délégation syndicale, dans la mesure où ces derniers sont spécifiquement protégés dans l’entreprise et surtout en matière de licenciement.

Cela étant, il nous faut relever plusieurs insuffisances dont fait montre le droit congolais quant à la procédure du licenciement tant individuel (1) que massif (2).

  1. En cas de licenciement individuel

En matière de licenciement individuel, l’article 72 nous semble être silencieux en ce qui concerne la procédure à applique lors du licenciement dans la mesure où il se limite à donner à l’employeur qui veut mener l’enquête sur les faits portés à l’encontre du travail, le pouvoir de suspendre ce dernier et de le notifier quant à ce.

L’article 76 quant à lui prévoit la possibilité pour l’employeur de notifier le travailleur de sa décision du licenciement.

En l’espèce, le législateur congolais n’a pas prévu une procédure spécifique en cas de licenciement au sens des formalités à suivre à la lettre pour procéder au licenciement.

De ce fait, le droit du travail sacralisé par la doctrine par rapport à son objet, qui est de protéger les salariés des abus de leurs employeurs, se n’avère ne pas répondre aux aspirations des travailleurs congolais en matière de licenciement individuel où l’arbitraire de l’employeur semble être la seule voix à suivre pour ce faire.

Contrairement au droit congolais du travail, le droit français et allemand ont bel et bien prévue des étapes à suivre pour procéder au licenciement, à savoir : la convocation du salarié à un entretien préalable, afin que ce dernier se défende quant aux faits mis à sa charge devant l’employeur ; ces législations vont plus loin en prévoyant même que le salarié à ce niveau peut se faire assister par un représentant du personnel (ceci pour respecter le principe de contradictoire).

La deuxième étape de la procédure du licenciement prévue endroit français et allemand est celle de l’audition du salarié, qui est une suite logique de la première.

La troisième étape de la procédure intervient après la prise de la décision par l’employeur de licencier le travailleur, et dans ce cas tant le droit congolais, français qu’allemand prévoient la notification du licenciement au travailleur concerné.

La dernière étape de la procédure est aussi respectée tant en droit congolais, français qu’allemand, à savoir l’indemnisation du licenciement, comprenant plusieurs indemnités susceptibles d’être payé lorsque les conditions y afférentes sont remplies.

  • En cas de licenciement massif ou pour motif économique

S’agissant de la procédure du licenciement massif ou pour motif économique, le législateur congolais semble ne pas être précis par rapport au contenu des « raisons économiques » en ouvrant la brèche à n’importe quelle interprétation des raisons économiques pouvant entrainer le licenciement massif des salariés.

Cependant quant à la procédure proprement dite de ce licenciement, le législateur congolais en a prévu une, qui malgré ses zones d’ombre, existe et est respectée par les employeurs congolais.

Cette procédure peut, après lecture des dispositions légales du code du travail, notamment l’article 78, être classé en quatre étapes suivantes :

  • La fixation de l’ordre de licenciement : qui est une étape dans laquelle l’employeur se réfère aux critères lui permettant d’établir un ordre des licenciements afin de déterminer quels postes (et non quels salariés) feront l’objet d’un licenciement dans l’entreprise.

A cet effet, l’employeur « doit respecter l’ordre des licenciements établi en tenant compte de la qualification professionnelle, de l’ancienneté dans l’établissement et des charges de famille du travailleur ». et par conséquent, « seront licenciés en premier lieu, les travailleurs présentant les moindres aptitudes professionnelles pour les emplois maintenus et, en cas d’égalité d’aptitudes professionnelles, les travailleurs les moins anciens, l’ancienneté étant majorée d’un an pour le travailleur marié et d’un an pour chaque enfant à charge »[36].

  • Analyse critique de la procédure du licenciement de salariés spécialement protégés

Le régime protecteur dans ce cas concerne tant le licenciement des travailleurs membres de la délégation syndicale que toute rupture à l’initiative de l’employeur, ainsi que la rupture conventionnelle.

Et par rapport à cette procédure qui se veut spéciale, nous estimons après lecture du code du travail que la spécialité de cette procédure réside dans l’approbation obligatoire de l’inspecteur de travail de la décision du licenciement pris par l’employeur.

Tandis que les autres procédures concernant le licenciement individuel et massif restent inchangées.

Cette procédure spéciale propre au licenciement du salarié protégé implique donc:

  • une consultation du comité d’entreprise sur le projet de licenciement du salarié protégé (sauf pour les délégués syndicaux qui ne sont pas visés par l’article 78) ;
  • une demande d’autorisation de licencier adressée à l’inspection du travail[37].

Le législateur congolais précise encore que la protection est applicable pendant toute la durée du mandat (trois ans en principe, sauf dispositions conventionnelles différentes) à compter du jour de proclamation des résultats aux élections professionnelles[38].

Les droits français et allemand vont plus loin, en prévoyant que le bénéfice du statut protecteur s’applique dès que l’employeur a reçu la notification de la désignation d’un délégué syndical travaillant au sein de son entreprise et pendant tout le mandat (protection pendant les 12 mois suivant la fin de son mandat s’il a duré au moins un an). Il en est de même si l’employeur a connaissance de l’imminence de la désignation avant d’avoir convoqué le salarié à un entretien préalable à son licenciement[39].

§2. Perspectives

Comme nous l’avions démontré depuis le début de cette étude, le licenciement est la rupture du contrat de travail par l’employeur. Il doit être motivé par un motif prévu par la loi.

C’est ainsi que le licenciement nécessite aussi une procédure prévue par la loi afin d’éviter l’arbitraire que peuvent user les employeurs à l’encontre de leurs travailleurs livrés à eux-mêmes.

Alors qu’en est-il du droit congolais du travail, qui semble avoir pour vocation la protection des intérêts des salariés, le travail étant considéré en République démocratique du Congo comme la principale source des revenus pour la survie des ménages ? Telle est la question qui nous a permis de mener nos investigations.

En effet, selon notre étude, nous remarquons que le législateur congolais soumet le licenciement du travailleur à des règles de procédure imprécises et s’est très peu préoccupé du non respect de ces règles par l’employeur.

Les irrégularités de procédure du licenciement appellent qualification et sanction sur lesquelles, en l’absence de dispositions légales, les juges adoptent des positions très variées.

L’insécurité juridique qui en découle appelle l’intervention du législateur qui pourrait s’inspirer des solutions que nous comptons proposer dans le cadre de ce travail de fin d’étude, nous inspirant du droit français et du droit allemand, choisis depuis le début de ce travail comme droits de comparaison avec le droit congolais du travail.

A la lumière des notions précédentes telles que développées, nos perspectives tourneront autour des suggestions quant aux prévisions légales d’une procédure appropriée au licenciement tant individuel (A) que massif (B).

  1. Perspectives quant la procédure du licenciement individuel

Notre étude démontre depuis le début que licenciement doit obéir à des règles de procédure dont l’employeur ne peut se passer.

Pour ce qui est du licenciement individuel, nos perspectives tourneront au tour de deux types de licenciement individuel, à savoir : pour motif disciplinaire (en cas de faute du salarié), pour motif non disciplinaire (en cas d’insuffisance professionnelle, d’inaptitude physique, de refus d’une modification du contrat de travail…).

            S’agissant du licenciement individuel pour motif personnel, particulièrement pour la faute lourde, le législateur congolais se borne en prévoyant une possibilité de rupture immédiate du contrat.

A cet effet, il se pose un problème à savoir celui de savoir, qui est habilité à juger qu’une faute peut être réputée comme lourde ou non, car le législateur congolais ne pas aussi précis lorsqu’il dit qu’il prévoit qu’une partie est réputée avoir commis une faute lourde lorsque les règles de la bonne foi ne permettent pas d’exiger de l’autre qu’elle continue à exécuter le contrat[40].

C’est pourquoi nous préconisons que le législateur congolais respecte les étapes prévues en droit français et allemand lorsqu’un travailleur commet une faute passible du licenciement, à savoir : convoquer le travailleur pour demande d’explication quant aux faits lui reprocher, avant de le notifier de la décision.

Cependant, dans le but de protéger les salariés, le législateur congolais doit aussi bien définir la faute lourde, tout en prévoyant la possibilité d’un recours gracieux du salarié en cas de licenciement, avant toute initiative de saisine de l’inspection du travail.

            Le licenciement individuel pour motif lié à l’aptitude du travail quant à lui, reproche le législateur congolais de n’avoir pas spécifié ce qu’il faut entendre par l’inaptitude du travailleur et la procédure particulière quant à ce. Cela peut entretenir l’arbitraire dans le chef de l’employeur.

De ce fait, nous proposerons au législateur congolais de prévoir ce type de licenciement comme dernier recours de l’employeur lorsque le travailleur est inapte quant à ses taches au travail.

L’employeur devra d’abord tenter le changement des conditions de travail peut être imposé par l’employeur dans le cadre de son pouvoir de direction. Le refus du salarié (autre fois inapte) peut à cet effet entrainer la rupture du contrat et peut constituer une faute professionnelle que l’employeur est en droit de sanctionner par le licenciement.

Le législateur devra alors encadre ce type de licenciement par quelque préalables justifiant l’insuffisance professionnelle ou l’incompétence du travailleur, à savoir :

  • elle doit reposer sur des faits précis et vérifiables ;
  • elle doit être imputable au salarié (ni du fait de l’employeur, ni liée à la conjoncture économique) ;
  • elle doit enfin reposer sur des faits en rapport avec la conformité des tâches confiées au salarié au regard de sa qualification.

Le législateur congolais devra prévoir que si ces conditions ne sont pas toutes réunies, le licenciement lié à l’aptitude du travailleur, le licenciement soit interdit.

A ces conditions, le droit  français parait encore plus explicite lorsqu’il prévoit qu’« il faut également prendre en compte l’éventuelle responsabilité de l’employeur face à un constat d’insuffisance professionnelle.

Ce dernier ne saurait invoquer un tel motif s’il a par exemple, il a recruté un salarié qui n’avait manifestement pas la qualification nécessaire ou s’il a confié des tâches ne relevant pas de la qualification pour laquelle l’embauche a été faite, si les tâches confiées sont excessives, ou encore s’il n’a pas assuré l’adaptation du salarié à son poste de travail à laquelle il est tenu, notamment du fait de l’évolution des emplois, des technologie et des organisations »[41].

  • Perspectives quant la procédure du licenciement massif

La procédure du licenciement pour motif économique est bien organisée en droit congolais que celui individuel.

Cependant, le législateur congolais doit encore renforcer les conditions préalables à observer pour procéder à ce licenciement, qui souvent est à la base de l’augmentation du taux de chômage qui, en République démocratique du Congo, est déjà très élevé.

Nous estimons que le législateur devra prévoir que l’inspection du travail soit habilitée à vérifier :

  • la réalité et le sérieux des motifs avancés (les difficultés devront de toute façon être suffisamment importantes et durables pour justifier la suppression d’un emploi ou la moduification d’un contrat de travail) ;
  • l’inspection du travail devra rester  souveraine dans son contrôle et appréciation : il ne devra pas se contenter de constater les difficultés économiques avancées mais devra aussi apprécier la réalité de celles-ci au regard des mesures prises.

Il ferait donc « parler » les chiffres qui doivent lui être préalablement soumis avant d’autoriser le licenciement pour motif économique, etc.

A cet effet, la jurisprudence français nous inspire lorsqu’elle ne reconnait pas le caractère économique pour des licenciements motivés par :

  • Des difficultés passagères et non durables ;
  • Des difficultés économiques obligeant à supprimer le poste d’un salarié alors que moins d’un mois avant l’engagement de la procédure un salarié avait été recruté pour exercer les mêmes fonctions ;
  • La volonté de réduire les frais fixes dans une entreprise dont la situation financière est excellente ou dans une entreprise déficitaire depuis des années en l’absence de démonstration d’une aggravation de la situation ;
  • La simple perte d’un contrat ou d’un marché.

L’Inspecteur du travail, qui selon le code du travail[42], s’assure avant la mise en œuvre des licenciements du respect de la procédure prescrite et des critères retenus par l’employeur.

En cas de non-respect de la procédure ou des critères fixés, l’Inspecteur du Travail le notifie par écrit à l’employeur. Celui-ci est tenu de répondre avant de procéder aux licenciements.

L’inspecteur du travail devra inscrire ces conditions préalables proposées ci-dessus, si elles sont légiférées, pour assurer plus de protection du travailleur e droit du travail congolais.


[1] Les juges ont également précisé cet ordonnancement par une jurisprudence abondante.

[2] J. PICOTTE, « Juridictionnaire », in RECUEIL DES DIFFICULTÉS ET DES RESSOURCES DU FRANÇAIS JURIDIQUE, Octobre 2005, p. 52.

[3] Article 72, alinéa 4 de la Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail telle que modifiée et complétée par la loi n° 16/010 du 15 juillet 2016, in JO RDC, Numéro spécial, 57ème année, 29 juillet 2016.

[4] Article 72, alinéa 7, Idem.

[5] C’est dans ce même ordre d’idées que le législateur a précisé que « la durée de la suspension ne peut excéder quinze jours, et un délai supplémentaire de quinze jours est accordé à l’employeur dont le siège social ne se trouve pas sur le lieu d’exécution du contrat ».

[6] Cfr contenu de la Convention collective interprofessionnelle nationale du travail du 30 septembre 1995.

[7] Si la convocation est adressée à un salarié en arrêt maladie, il est conseillé de fixer l’heure de l’entretien pendant les heures de sortie autorisée par le médecin.

[8] ORGANISATION INTERNATIONALE DU TRAVAIL, « Présentation du droit du travail de la République fédérale d’Allemagne », in www.ilo.org consulté le 09/05/2019 à 18h00

[9] Article 72 de la Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail telle que modifiée et complétée par la loi n° 16/010 du 15 juillet 2016, in JO RDC, Numéro spécial, 57ème année, 29 juillet 2016.

[10] L’employeur ne pouvant pas devant les tribunaux invoquer un motif non tiré de la lettre notifiée au salarié.

[11] ORGANISATION INTERNATIONALE DU TRAVAIL, Op.cit.,  consulté le 09/05/2019 à 18h15.

[12] Cfr le contenu de l’article 64, alinéa 3 de la Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail telle que modifiée et complétée par la loi n° 16/010 du 15 juillet 2016, in JO RDC, Numéro spécial, 57ème année, 29 juillet 2016.

[13] Article 60, point a, Idem.

[14] Cette indemnité est prévue à l’article 63, alinéa 3 de la loi sous examen, qui dispose « La rupture de contrat à durée indéterminée sans préavis ou sans que le préavis ait été intégralement observé comporte l’obligation, pour la partie responsable, de verser à l’autre partie une indemnité dont le montant correspond à la rémunération et aux avantages de toute nature dont aurait bénéficié le travailleur durant le délai de préavis qui n’a pas été effectivement respecté ».

[15] Article 144 de la Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail telle que modifiée et complétée par la loi n° 16/010 du 15 juillet 2016, in JO RDC, Numéro spécial, 57ème année, 29 juillet 2016.

[16] Cfr contenu de la Convention collective interprofessionnelle nationale du travail du 30 septembre 1995.

[17] Article 258, aux alinéas 1, 3 et 4 de la Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail telle que modifiée et complétée par la loi n° 16/010 du 15 juillet 2016, in JO RDC, Numéro spécial, 57ème année, 29 juillet 2016.

[18] ORGANISATION INTERNATIONALE DU TRAVAIL, Op.cit.,  consulté le 09/05/2019 à 22h15.

[19] Article 78, alinéa 1er de la Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail telle que modifiée et complétée par la loi n° 16/010 du 15 juillet 2016, in JO RDC, Numéro spécial, 57ème année, 29 juillet 2016.

[20] Article 78, alinéa 2, Idem.

[21] Article 62, alinéa 3, Ibidem.

[22] Cfr l’article 78, alinéa 2 de la Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail telle que modifiée et complétée par la loi n° 16/010 du 15 juillet 2016, in JO RDC, Numéro spécial, 57ème année, 29 juillet 2016.

[23] A. VERHULST, Comptabilité analytique d’exploitation, Kinshasa, ed. CRP, 1984, p. 59.

[24] En l’espèce, les juges français et allemand devront donc apprécier ; ce qui nous semble n’être pas le cas en droit congolais, qui reste silencieux quant à ce. En d’autres termes, les juges ne  se contentent pas de constater les difficultés économiques avancées mais apprécient la réalité de celles-ci au regard des mesures prises.

[25] Article 78, aux alinéas 2, 3 et 4 de la Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail telle que modifiée et complétée par la loi n° 16/010 du 15 juillet 2016, in JO RDC, Numéro spécial, 57ème année, 29 juillet 2016.

[26] Article 78, alinéa 5ème, Idem.

[27] MANGWAYA BUKUKU, Op.cit., p. 458.

[28] Nous pouvons imaginer à titre illustratif le cas ci-après : Un changement de matériel informatique important rendant inévitable des suppressions d’emploi ou encore l’adaptation/ reclassement des salariés, La suppression du poste de l’activité d’illustrateur sonore en raison du recours à de nouveaux moyens de reportage, et La mise en place d’une gestion informatique des dossiers, la salariée n’ayant pu s’adapter à l’évolution de son emploi malgré la formation dispensée.

[29]  Cass. Soc. 1er avril 1992, n° 90-44697, trouvé sur https://www.jurisprudence-cour-francaise-en-matiere-de-licenciement-massif/o87 consulté le 13 mai 2019 à 07h40.

[30] Cass. Soc. 24 juin 2003, n° 01-42713, https://www.jurisprudence-cour-francaise-en-matiere-de-licenciement-massif/o87 consulté le 13 mai 2019 à 07h40.

[31] Cass. Soc. 31 mai 2006, n° 04-47376, in https://www.jurisprudence-cour-francaise-en-matiere-de-licenciement-massif/o87 consulté le 13 mai 2019 à 07h50.

[32] Cass. Soc. 24 mars 2010, n° 09-40444, Idem.

[33] A. VERHULST, Op.cit., p. 92.

[34] DETREZ ELISA, La protection du salarié face au licenciement, étude comparée des droits du travail français, allemand et britannique : des garanties identiques ?, Mémoire de fin d’études, Institut d’Etude Politiques de Lyon, 2004-2005, p. 9.

[35] A. ILOKI, Le droit du licenciement au Congo, Paris, l’Harmattan, 2000, p. 20.

[36] Article 78 aux alinéas 2 et 4 de la Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail telle que modifiée et complétée par la loi n° 16/010 du 15 juillet 2016, in JO RDC, Numéro spécial, 57ème année, 29 juillet 2016.

[37] Article 258, alinéa 1er de la Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail telle que modifiée et complétée par la loi n° 16/010 du 15 juillet 2016, in JO RDC, Numéro spécial, 57ème année, 29 juillet 2016.

[38] Article 257, alinéa 1er, Idem.

[39] DETREZ ELISA, Op.cit., p. 14.

[40] Article 72, alinéa 2 de la Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail telle que modifiée et complétée par la loi n° 16/010 du 15 juillet 2016, in JO RDC, Numéro spécial, 57ème année, 29 juillet 2016.

[41]  Article 6321-1 de la Loi française  n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.

[42] Article 78, aux alinéas 8 et 9 de la Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail telle que modifiée et complétée par la loi n° 16/010 du 15 juillet 2016, in JO RDC, Numéro spécial, 57ème année, 29 juillet 2016.

CONCLUSION

Comme nous l’avions démontré au cours de cette analyse, dans diverses législations contemporaines relatives au travail, le licenciement obéit à des règles de procédure dont l’employeur ne peut se passer.

Pour autant notre analyse semble avoir relevé le fait que le législateur congolais n’a pas toujours précisé les conséquences qui s’attachent au manquement à ces règles procédurales et les imprécisions procédurales à cet égard sont bien remarquables.

L’imprécision voire l’absence de la procédure du licenciement en droit positif congolais devient alors un objet d’étude qui a mérité que l’on s’y intéresse.

Lorsque le contrat de travail est à durée indéterminée, l’employeur a la possibilité d’y mettre fin à sa seule initiative. On parle de licenciement.

Il est défini comme « l’acte par lequel l’employeur rompt unilatéralement le contrat de travail et congédie un ou plusieurs salariés »[1].

            Notre analyse a consisté à évoquer le fait que, outre l’exigence d’un motif objectif et sérieux, le licenciement est encadré par des règles de procédure ; et cela tant en droit allemand, français que congolais.

Elles consistent soit dans le respect de formes soit dans l’accomplissement de formalités spécifiques. Elles varient selon qu’il s’agit d’un licenciement pour motif personnel ou d’un licenciement pour motif économique.

Le processus qui aboutit au licenciement pour motif personnel se décompose en deux grandes phases : l’entretien préalable et la notification du licenciement.

La procédure du licenciement pour motif économique comporte trois phases importantes, à savoir l’information de l’inspecteur du travail du licenciement projeté, la consultation des délégués du personnel et la notification du licenciement.

Le licenciement des délégués est subordonné à l’autorisation préalable de l’inspecteur du travail.

Notre inquiétude au cours de cette analyse résidait dans le fait que le droit congolais du travail n’était pas à la hauteur parfaite de la protection du salarié tel que les doctrinaires congolais du droit du travail ont toujours revendiqué comme but de ce droit, à savoir la protection du travailleur.

Ces imprécisions que comporte le Code du travail congolais est à l’origine de plusieurs recours en litige du travail devant les Inspecteurs congolais du travail et les tribunaux congolais du travail, car ayant laissé à l’employeur la liberté de procéder au licenciement sans plusieurs restrictions et une procédure adéquate, les salariés licenciés se trouvent victimes de plusieurs abus perpétrés par les employeurs.

Une étude jurisprudentielle serait intéressante pour démontrer cette affirmation ; cependant, nous nous sommes penchée dans nos recherches sur les prévisions légales sans faire intervenir l’analyse jurisprudentielle.

On comprend au terme de cette analyse que les règles de procédure du licenciement visent à prévenir le risque de licenciement qui doit être la mesure ultime et à préparer un éventuel contentieux[2].

Quels que puissent être les motifs du licenciement ou encore leur gravité, les règles de procédure doivent être respectées par l’employeur.

A cet égard, une partie de la doctrine fait observer que « les garanties de procédure sont surtout utiles lorsque les risques de licenciement sont les plus sérieux»[3] et il a été décidé que la procédure d’entretien doit avoir lieu quelle que soit la gravité de la faute commise par le salarié[4], même si le salarié a reconnu par écrit avoir commis les fautes qui lui sont reprochées[5].

Toutes ces précisions de la jurisprudence françaises nous montrent l’importance du respect de la procédure du licenciement dans la protection du salarié.

L’employeur donc qui envisage de licencier le travailleur doit impérativement respecter la procédure du licenciement.

L’évidence de cette réalité cache cependant la controverse qui entoure la qualification du manquement constitué par le non-respect des règles procédurales du licenciement.

Lorsqu’à l’occasion de la rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur, le dispositif procédural du licenciement n’est pas respecté par celui-ci, comment peut-on qualifier le manquement dont il se rend ainsi coupable ?

Le législateur congolais est resté muet sur la question et les juges adoptent des solutions diverses. Le licenciement sous-tendu par un motif objectif et sérieux mais prononcé en violation des règles de procédure serait abusif[6], abusif en la forme ou irrégulier en la forme.

La divergence de vues incite à rechercher la qualification du manquement aux règles de procédure du licenciement.

Dans le prolongement de cette préoccupation, la question reste particulièrement posée de la sanction de la violation des règles de procédure du licenciement.

En effet, le législateur congolais n’a pas prévu la sanction spéciale applicable aux irrégularités de procédure.

L’inobservation des règles de procédure du licenciement pose alors, en droit congolais, le problème de la qualification du manquement à ces règles et de la sanction encourue par l’employeur.

A ces questions, la présente analyse ne peut répondre dans la mesure où elle s’est penchée sur la procédure et non sur les suggestions au législateur congolais quant à la qualification juridique et la sanction spécifique de l’irrespect de la procédure du licenciement.


[1] G. CORNU, Vocabulaire juridique, Paris, PUF, 2010, p. 561.

[2] MAZEAUD (A.), Droit du travail, Paris, Montchrestien, 7ème édition, 2010, p. 375.

[3] J. PELISSIER, G. AUZERO et E. DOCKES, Droit du travail, Paris, Dalloz, 26ème édition, 2012, p. 457.

[4] Soc. 22 mars 1979, Dr. soc. 1979. 293, obs. J. Savatier ; Soc. 9 octobre 1980, Bull. civ. V. n° 534, in https://www.jurisprudence-cour-francaise-en-matiere-de-licenciement-massif/o87 consulté le 15 mai 2019 à 10h50.

[5] Soc. 9 avr. 1987, Jur. soc. 1987, NB 57, in https://www.jurisprudence-cour-francaise-en-matiere-de-licenciement-massif/o87 consulté le 15 mai 2019 à 10h50.

[6] Article 63 de la Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail telle que modifiée et complétée par la loi n° 16/010 du 15 juillet 2016, in JO RDC, Numéro spécial, 57ème année, 29 juillet 2016.

BIBLIOGRAPHIE

  1. TEXTES JURIDIQUES
  2. Textes étrangers
  • Code du travail français de 1989 ;
  • Convention Genève du 02 juin 1982 sur la cessation de la relation de travail sur l’initiative de l’employeur, entrée en vigueur en 1985 ;
  • Loi française n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.
  • Textes nationaux
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  • Arrêté ministériel n° 036/95 du 21 juin 1995portant Recours judiciaire contre la décision de l’inspecteur du travail en cas de licenciement ou de mutation d’un délégué titulaire ou suppléant, in Les Codes Larcier, Tome IV : Droit du travail et de la sécurité sociale, p. 110 ;
  • Constitution de la RDC du 18 février 2006 telle que modifiée par la loi n° 11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la République démocratique du Congo, in JO RDC du 1er février 2011 ;
  • Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail telle que modifiée et complétée par la loi n° 16/010 du 15 juillet 2016, in JO RDC, Numéro spécial, 57ème année, 29 juillet 2016 ;
  • Loi n°016-2002 du 16 octobre 2002 portant création, organisation et fonctionnement des tribunaux du travail ;
  • Ordonnance n° 14/080 du 08 décembre 2014 portant règlement d’administration relatif au personnel de l’inspection générale du travail, IGT en sigle.
  1. JURISPRUDENCE
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  • Travail inédit
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  1. WEBOGRAPHIE

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